L’Ardèche et la Haute-Loire – 2016.

Pour ma petite virée “septembrienne” de 2016, j’ai choisi un coin de France que je ne connaissais pas encore, à savoir les départements de l’Ardèche et de la Haute-Loire. Comme je démarre de Montpellier je passerai aussi par l’Hérault, le Gard et la Lozère, où j’aurai l’occasion de faire quelques stops. C’est parti pour une semaine de plaisir(s) et d’enchantement!

Histoire de situer le lieu de l’intrigue…

Mais avant l’Ardèche, un passage par le Gard.

Atterrir à Montpellier pour aller en Ardèche? Ben oui, en fait l’aéroport de Nîmes offrait des horaires de vols trop irréguliers qui ne m’arrangeaient pas; et je voulais passer par le Gard pour m’attarder sur quelques endroits que je ne connaissais pas encore.

Je m’arrête d’abord à Sommières, à 35 km de Montpellier. C’est un sympathique petite ville médiévale étagée sur les rives du Vidourle, un fleuve venant des Cévennes. Pour se garer, pas de souci, il y a un grand parking sur la rive opposée, et on entre dans Sommières en franchissant le pont romain et en passant sous la Tour de l’Horloge et son campanile. Le centre médiéval n’est pas mal avec ses rues en damier, la plupart sont piétonnes et le gros de la circulation contourne la vieille ville, bonne initiative! Seules quelques camionnettes quittent à présent la place des Docteurs Dax, car c’était jour de marché ce matin (c’est con, je l’ai loupé de peu!).

Vue sur sommières.

Jolie place vraiment, avec ses arches à arcades romanes qui soutiennent les habitations à l’étage, celles-ci cherchant à se protéger des crues (parfois méchantes) du Vidourle. Une partie de ces arcades sert de terrasses extérieures aux bars de la place. Pour les cinéphiles, les scènes du vieux marché à arcades dans “Jean de Florette” ont été tournées ici!

En montant vers le chateau par une rue en pente digne d’un film de cape et d’épée, un superbe panorama s’étale sur Sommières et ses toits de tuiles rouges. En redescendant vers la riivière, on se perd dans un entrelac de ruelles, d’impasses et d’étroits passages voûtés, certains avec des noms à tomber, comme le “passage Bombe-Cul”…

Sommières: Le Vidourle.
Sommières.
Sommières.
Sommières: la Tour de l’Horloge.
Excellent, le nom (j’en dirais pas autant du tag..;)!

Je pensais aller à Uzès d’une traite, mais sur la route, à travers un joli paysage de garrigue, voici que se détache sur ma droite un village perché, dominé par un chateau: c’est Montpezat. Allons donc voir çà de plus près. Des ruelles pentues, certaines avec de gros pavés disjoints par endroits, et un chateau massif, propriété privée à ce qu’il paraît. Un bijou de petit village, qui n’est pas sans me rappeler les villages perchés du Vaucluse en Provence.

Montpezat.
Montpezat.

Uzès, “premier Duché de France”.

On la voit de loin, la ville d’Uzès avec ses tours qui se détachent au loin dans le paysage. Elle se découvre à pied, il y a tout ce qu’il faut pour se garer aux abords de la ville. Uzès est ceinturée par le boulevard Gambetta, très commerçant, et la ville médiévale est un dédale de ruelles et de placettes ombragées bordées de magnifiques hôtels particuliers des 17ème et 18ème siècles. On arrive vite sur la Place aux Herbes avec ses vieilles maisons, ses arcades et sa fontaine; dans les rues avoisinantes se tient chaque samedi un marché réputé dans la région (loupé aussi, dis donc, moi et les marchés ça fait deux…). A deux pas de cette Place aux Herbes, le jardin médiéval et ses 450 variétés de plantes potagères et médicinales, est un petit havre de paix.

On entend souvent parler du “Duché” d’Uzès. Pourquoi ce titre? Attends, je prends ma craie et je t’explique:

C’est pas sorcier, comme dirait Jamy! Bon alors, ce duché, cette ville dans la ville, à quoi il ressemble? Il se compose du chateau avec sa façade Renaissance mélangeant les trois ordres architecturaux classiques (dorique, ionique, corinthien… ça te rappelle les cours d’histoire, pas vrai?). La visite de l’intérieur, avec ses nombreuses pièces somptueuses, est guidée. On ne visite pas tout, le chateau étant toujours propriété de la famille de Crussol, et on sent vraiment leur présence à travers les nombreux portraits et photos de famille sur plusieurs générations.

La Tour Bermonde, donjon primitif du chateau, domine l’ensemble. On peut grimper à son sommet (135 marches) avec à la clé une super vue sur la ville. Au loin se profile la cathédrale Saint-Théodorit et son clocher, la Tour Fenestrelle, qui ressemble un peu aux campaniles italiens toscans. Elle doit tout simplement son nom aux nombreuses “fenêtres” qui rythment ses étages. Avec le palais ducal, il est un des symboles de la ville d’Uzès.

Uzès: la cathédrale.
Le “Duché” d’Uzès.

Entre Uzès et Pont-Saint-Esprit.

Quittons maintenant Uzès pour traverser la région appelée l’Uzège, qui comporte quelques très beaux villages. Entre autres, celui de Saint-Quentin-la-Poterie, à 5 km d’Uzès. Par son nom, le village évoque sa vocation qui a duré des siècles, la poterie. Depuis le 12ème siècle, de nombreux fours fonctionnaient aux alentours du village, mais le chemin de fer a signé le déclin de la production; le dernier four à briques a arrêté son activité en 1925. Mais depuis 1983, le village revit grâce à la “Maison de la Terre”, qui encouragea l’arrivée d’artisans céramistes, qui actuellement produisent et vendent leurs oeuvres dans leurs petites boutiques qui n’ont pas encore cédé à la mode du tourisme de masse. Pourvu que ça dure! Pour ne rien gâcher, c’est aussi un joli village aux petites rues calmes.

Saint-Quentin-la-Poterie.
Saint-Quentin-la-Poterie.
Saint-Quentin-la-Poterie.

A quelques km de Saint-Quentin-la-Poterie, c’est dans le petit village de la Bastide-d’Engras que je pose mon sac pour ce soir. A peine 200 habitants, quelques rues et calades à gros galets ronds, une petite église faisant face à un genre de beffroi et un gros chateau (privé), au coeur d’un paysage de champs d’oliviers et de vignes. Voilà pour le cadre de ce petit village du “Gard provençal”, super calme et peu touristique! Je dors dans un petit appartement (Airbnb) attenant à la maison d’un couple de retraités charmants avec l’accent chantant du midi.

La Bastide-d’Engras.

Le lendemain, je continue de sillonner le Gard, néanmoins l’Ardèche se rapproche peu à peu. Tiens, je croise pas mal de camionnettes et 4X4 de chasseurs qui s’en vont se mesurer aux sangliers du coin. J’en surprendrai même un qui traversera la route pile devant mon véhicule (un sanglier, pas un chasseur…), m’obligeant à donner un coup de frein! Je m’arrête à Lussan, un autre superbe village perché du Gard, visible de loin sur son promontoire rocheux, avec sa ceinture de remparts et son imposant chateau médiéval. Il a du style, ce chateau (il abrite la mairie), avec ses quatre tours d’angle rondes (dont l’une dotée d’un campanile doté d’une horloge). Ce village aux vieilles maisons de pierre est super tranquille, je n’y ai quasiment croisé personne. Et dire que Lussan a été un actif centre de production de soie au 19ème siècle: il existait trois filatures dans le village.

Je me dirige à présent vers Pont-saint-Esprit; l’Ardèche, on y est presque!

Lussan.

En réalité, je ne pensais pas m’arrêter à Pont-Saint-Esprit, dans mon impatience de découvrir les gorges de l’Ardèche. J’ai changé d’avis et je n’ai pas regretté la découverte de cette cité paisible, avec son centre ancien et ses petites rues calmes. Le pont de pierre à 26 arches enjambant le Rhône, long de 1km, a donné son nom à la cité. Pont-Saint-Esprit a aussi défrayé la chronique dans les années 1950 avec l’étrange affaire du “pain maudit”.

Et… sauras-tu me dire le nom des habitants de cette sympathique ville? Allez, on joue avec Mister Foucault? Tu as encore droit au 50/50 ou au vote du public…

Petite ambiance musicale qui va avec!!

Yess! C’est bien la réponse B: les Spiripontains! Tu gagnes…eeuh…. ben disons toute mon estime! :mrgreen:

Les gorges de l’Ardèche: on y est!!

Peu après Pont-Saint-Esprit, je franchis un pont enjambant un paisible cours d’eau. Voilà ma première rencontre avec la rivière Ardèche, qui se jette dans le Rhône tout près d’ici. Encore un peu de patience, les gorges se rapprochent!

Je passe par Saint-Martin-d’Ardèche, petit patelin paisible au bord de la rivière, traversée par un étonnant (et étroit) pont suspendu. En traversant ce pont, on change de département, je reviens brièvement dans le Gard, le cours d’eau délimitant les deux départements! Je franchis le pont pour rejoindre le village médiéval d’Aiguèze, perché sur une falaise au-dessus de l’Ardèche. Au loin se déploient les fameuses gorges sur plus de 30 km.

Aiguèze s’est développé près de son chateau, maintenant en ruines; son chemin de ronde offre de belles échappées sur la rivière. Aiguèze est labellisé parmi les “Plus Beaux Villages de France”, et c’est pas pour rien: c’est plein de ruelles pavées ou en calades, avec des porches et des passages voûtés. Et… sur une placette, on peut lire cette anecdote: “Dans cette maison a vécu de 1706 à 1776 Honoré Agrefoul, distillateur, inventeur de l’absinthe, connue de nos jours sous le nom de pastis”. J’entends déjà les marseillais crier au scandale, mais pas de panique, ce Agrefoul est un personnage fictif né de l’imagination d’un plaisantin d’Arles qui inaugura la plaque en 1985 déguisé en François Mitterrand! Gonflé le mec! Et il faut voir aussi l’air ahuri du gars sur la plaque…

L’Ardèche et Aiguèze au loin.
Le voilà, mister Agrefoul!

Et maintenant, place au spectacle! La D290 suit plus ou moins le tracé de l’Ardèche qui se faufile entre des falaises de plus de 200m de haut, en dessinant de somptueux méandres en pleine nature sauvage. La route qui rejoint Vallon-Pont-d’Arc la surplombe par le nord, et de nombreux belvédères sont aménagés sur le trajet; ils sont très bien foutus je dois dire, avec de la place pour pouvoir se garer et des plate-formes sécurisées. Pas mal de monde qui circule: des cyclistes, des voitures (souvent à plaque étrangère), et aussi des camping-cars. Mais la route est assez large, et les 11 belvédères, faciles d’accès, offrent des points de vue “de ouf” sur la rivière tout en bas, se glissant entre les vertigineux monstres de calcaire. Quelques kayaks sillonnent le cours d’eau, mais heureusement on est loin de l’hystérie collective estivale qui “asphyxie” les gorges avec parfois de vrais embouteillages d’embarcations, avec le lot habituel de couillons qui prennent la rivière pour une déchetterie (ouais c’est clair que c’est plus facile de jeter ses mégots dans la flotte…). Un article révélateur ici.

Gorges de l’Ardèche.
Gorges de l’Ardèche.
Gorges de l’Ardèche.

Dans la direction de Vallon-Pont-d’Arc, on remonte le cours de l’Ardèche, et c’est une région où de nombreuses grottes et “avens” (* des gouffres naturels creusé par les eaux dans un terrain calcaire) se sont formés: la grotte de la Madeleine, l’Aven Marzal, et surtout, la Caverne du Pont-d’Arc, minutieuse et fidèle réplique de la grotte Chauvet. Les fresques ont été fidèlement reproduites, ainsi que l’humidité, les odeurs et la température de la grotte originale!

Une autre “star” des gorges est le célèbre Pont-d’Arc, cette arche naturelle de roc calcaire qui a des airs d’arc de triomphe; avec plus de 50 m de haut et 60 m de large, il est le résultat du travail de l’eau qui, durant des millénaires, a creusé le calcaire jusqu’à le traverser et former un pont naturel. Le devoir de tout bon kayakiste est de passer en-dessous!

Mon ressenti: Franchement, les panoramas sur ces gorges étaient époustoufflants, c’est clair, mais j’ai trouvé un côté plus sauvage, plus “secret” aux gorges du Tarn que j’ai vues l’année précédente. De même pour la route, celle des gorges du Tarn est plus étroite, avec quelques passages dans des tunnels creusés dans la roche, et les points de vue sont parfois plus difficilement accessibles. Mais bien sûr, cela n’enlève rien au sublime du cours de la rivière Ardèche contemplé depuis les belvédères!

Entre Vallon-Pont-d’Arc et Chauzon.

L’arrivée à Vallon-Pont-d’Arc risque d’en refroidir plus d’un: ne perdons pas de vue que ce gros village est le point de départ de la descente des gorges en kayak; alors, même si on est déjà presque à la mi-septembre, il y a encore pas mal de monde. En été, çà doit être l’apocalypse, ici! La population est décuplée en été, paraît-il. L’épicentre du village est très fréquenté, mais il y a toujours moyen de trouver des petites ruelles plus calmes, par exemple du côté de l’église, où il fait plutôt calme. L’Hôtel de Ville est installé dans un château construit au 17ème siècle, et abrite des tapisseries d’Aubusson figurant les croisades.

Je me suis dégoté un petit resto à l’écart, qui propose une bonne pitance régionale. Bonne occasion pour goûter une spécialité ardéchoise, la caillette: ça ressemble à une grosse boulette de viande de porc, agrémenté de blettes ou d’épinards, enroulées dans de la crépine (une membrane de l’estomac du cochon) et cuites au four. La caillette peut se manger aussi bien chaude que froide.

Vallon-Pont-d’Arc.
Vallon-Pont-d’Arc.
Un délice ardéchois: la caillette.
Sur le mur du resto, j’ai bien aimé cette caricature sur les “exploits” nocturnes des sangliers dans les vignes de la région…

A travers un paysage de bois, de garrigue et de vignes, j’arrive à Labastide-de-Virac, à 10 km de Vallon-Pont-d’Arc. Ce petit village, avec ses petites rues pavées ou en calades, est dominé par son chateau du 14ème siècle. Et dire qu’en 1629, le roi Louis XIII et le cardinal de Richelieu ordonnèrent de détruire les remparts de la ville ainsi qu’une partie du chateau. Merçi, sympa, les gars… Le chateau abrite un musée de la soie avec un élevage de vers à soie qui fait découvrir le cycle complet, de l’œuf jusqu’à l’apparition du fil, et le filage des cocons.

Labastide-de-Virac.
Labastide-de-Virac.

A proximité du village, on peut visiter l’aven d’Orgnac. Un aven, c’est un puits naturel qui se forme en région calcaire, par dissolution soit par effondrement de la voûte rocheuse. Et celui d’Orgnac est un des plus grands de France. La visite dure une bonne heure. On descend à 120 m sous terre en empruntant un escalier de plus de 200 marches, mais pas de stress, la remontée se fait par ascenseur! L’aven a été découvert en 1935 par Robert de Joly, et dans la salle qui porte son nom, on y a placé son urne funéraire. Après Vallon-Pont-d’Arc, la route file vers l’ouest, direction Ruoms. Le paysage est plutôt plat, et n’a rien de trépidant. Si on ajoute à cela les magasins et les ronds-points qui se succèdent, je ne voyais pas trop la nécessité de sortir mon APN…Au niveau de Ruoms, un pont franchit l’Ardèche, qui dirait-on se “prépare mentalement” à défiler dans les gorges; elle est déjà bordée de parois rocheuses calcaires plus modestes.

Voici Labeaume. Chouette village! On y arrive par une petite route qui descend, avec sur la gauche une vue sur les falaises ciselées des gorges de la Baume. Ben non, ce n’est pas l’Ardèche qui longe le village, mais la Baume (c’était pas difficile de baptiser le village, avec çà); ses gorges, moins impressionnantes, ont néanmoins un aspect plus sauvage. Et le village? Vieilles maisons en pierre, ruelles étroites et tortueuses en gros galets, il ne se visite qu’à pied. Des bonnes chaussures de rando sont, je pense, nettement préférables à des souliers de ville ou des Louboutin… L’église de Labeaume est curieuse, avec son clocher soutenu par d’immenses colonnes. Une ruelle descend jusqu’à la rivière, enjambée par le vieux pont submersible construit au 19ème siècle.

Labeaume.
Labeaume.
Les gorges de la Baume.
Les gorges de la Baume.
L’Ardèche près de Ruoms.
Une ‘tite mousse au miel et à la chataîgne avant de repartir (mais une seule, hein, je conduis, quand-même…).

Je traverse encore l’Ardèche (2 fois!) avant de m’arrêter pour la nuit dans le petit village de Chauzon. Il n’y a pas de monuments remarquables, ni de ruelles pavées pentues, mais ses vieilles maisons en pierre et ses rues étroites lui confèrent un sentiment de tranquillité et d’anti-tourisme de masse. Mais il faut dire aussi que Balazuc, à quelques km, draine la grande majorité des visiteurs, qui ne font pas le détour par Chauzon. Tant pis pour eux, tant mieux pour moi! J’ai choisi un petit hôtel-resto familial au coeur du village, simple et pas cher, avec un petit bar attenant où les vieux du coin viennent siroter un blanc, et les ouvriers communaux un café le matin. Je profite de la soirée pour faire une petite balade dans les environs, car l’Ardèche passe tout près d’ici; pour la rejoindre, il faut passer par des petits chemins au milieu des vignes, après l’église. Celle-ci est excentrée du centre du village, je me demande pourquoi… Elles sont belles, les grappes de raisin! Les vendanges ne devraient plus tarder. Et tiens, un petit pommier sauvage, en bord du chemin, une bonne occasion de croquer une petite pomme rouge-verte un peu acidulée. Me voilà sur la rive droite de la rivière, qui a creusé de profonds méandres dans la roche calcaire, dessinant notamment le Cirque de Gens, réputé pour ses voies d’escalade.

Chauzon.
L’Ardèche près de Chauzon.

Balazuc et Vogüé.

Petit trajet ce matin, Balazuc n’est qu’à 8 km de Chauzon. Ce village, classé dans les “plus beaux villages de France” et perché sur son piton rocheux au-dessus de l’Ardèche, s’explore uniquement à pied. Il y a des parkings en dehors du site. C’est un festival de ruelles, impasses, petits jardinets en terrasses, escaliers tortueux, c’est plus pentu qu’à Labeaume, et c’est encore plus bordélique pour s’y retrouver. Autant se balader au hasard, en prenant l’église comme repère, par exemple. En montant, on a parfois droit à de jolies vues sur les toits du village et la vieille église avec son curieux clocher. Je suis chanceux: en arrivant tôt, je suis quasiment seul à explorer ce dédale de pierre; les troupeaux en autocar n’arriveront que bien plus tard, donc je savoure mon instant…

La rivière Ardèche coule en contrebas, traversée par un vieux pont. C’est de ce pont qu’on a une de plus chouettes vues sur Balazuc et les falaises qui longent la rivière. Je ne vois pas encore de kayakistes à cette heure, mais un loueur au bas du pont s’affaire à bichonner son matos, en attendant ses premiers clients.

Balazuc.
Balazuc.

Sur la rive opposée de l’Ardèche, face à Balazuc, démarre un petit sentier qui serpente entre la rivière aux falaises escarpées et un paysage de pâtures. En 20 minutes, me voilà arrivé au hameau du Viel-Audon, un lieu, comment dire… un brin surréaliste, un rien décalé, bref pas comme les autres. Le Viel-Audon, c’est une fantastique aventure humaine. Dans les années 1970, ce hameau perdu était en ruines, déserté par ses habitants à la fin du 19ème siècle. C’est alors qu’une petite bande de quatre “doux rêveurs” décide de ressusciter le hameau; ils ont même refusé la construction d’une route, préférant acheminer les matériaux par le sentier à bras d’homme ou en brouette (à l’entrée du hameau, une brouette “symbolique” est justement fichée en terre par les ridelles). Et depuis ce temps, d’innombrables jeunes bénévoles retapent ce petit paradis perdu. On transporte des planches de bois, on cultive les légumes dans un jardin partagé. Des chèvres, des cochons, des poules, des panneaux complètement déjantés (comme ce “péage d’autoroute”, mdr!)… Il est trop incroyable, ce lieu! J’ai même ressenti… de la gêne, c’est bizarre hein, une appréhension d’être un intrus dans ce microcosme un peu anarchique; ça me fait repenser à de vieux documentaires sur la mode “baba-cool” des années 70. L’endroit n’est pas pour autant “hermétique”, car un petit gîte d’étape s’y trouve, et des élèves de “classes vertes” y viennent pour se sensibiliser à l’aspect écolo des lieux. Et enfin, Dernière chose: “viel” n’est pas une faute d’orthographe, c’est ainsi que se dit “vieil” en patois du coin.

sentier vers le Viel-Audon.
Hameau du Viel-Audon.
Le comité d’accueil, je suppose…

A 7 km de Balazuc, voilà encore un très joli village: Vogüé, au bord de l’Ardèche, avec ses vieilles maisons et ses rues pavées passant sous des porches. Mais ce qui frappe quand on voit Vogüé de loin, c’est son majestueux chateau qui surplombe le site, avec ses quatre tours d’angle rondes, sa chapelle romane et son jardin suspendu. C’est un monument historique privé, appartenant toujours à la famille de Vogüé.

Pas très loin de Vogüé, le petit village de Lanas n’a rien de spécial, mais je m’arrête un court moment au cimetière, pour voir la tombe de Henri Charrière. Ce nom ne te dit peut-être rien à première vue, mais son surnom “Papillon”, te rappellera un film américain avec Steve Mc Queen. Il fut condamné aux travaux forcés à perpétuité au bagne en Guyane après avoir été jugé pour meurtre, ce qu’il a d’ailleurs toujours nié. Il s’évade plusieurs fois et sera gracié en 1970. Il décède en 1973.

Vogüé.
Chateau de Vogüé.

Aubenas, Mirabel, Alba-la-Romaine.

En direction d’Aubenas, près de Ucel, je trouve un petit resto de campagne sans fioritures; on voit que ce n’est pas un truc à touristes, le patron a de la personnalité et comme clients, il n’y a que trois ouvriers d’EDF en bleu de travail à une longue table. Le patron me demande si je préfère manger seul ou à côté d’eux, à leur table. Je vais casser la graine avec eux, on partagera même le grand pichet de vin rosé; entrée, plat, dessert, vin et café pour 15€ (⚠️ prix de 2016). Hé oui, ça existe encore, des additions à ce tarif, mais faut savoir les dénicher!

J’arrive à Aubenas, la “capitale” de l’Ardèche, perchée sur une colline d’où le panorama sur les monts d’Ardèche s’étend au loin. Pas mal de circulation en périphérie, mais c’est une ville de taille moyenne agréable à visiter, quelques rues étant piétonnes dans le centre ancien. Le chateau d’Aubenas (12ème siècle) a de la gueule avec ses deux imposantes tours rondes et son donjon. Pas moins de six familles seigneuriales l’ont habité depuis le 12ème siècle jusqu’à la Révolution. Sur la Place de l’Hôtel de Ville, une fontaine côtoie une petite halle couverte. Quoi d’autre comme monument? L’église Saint-Laurent, du 12ème siècle, détruite durant les guerres de religion et reconstruite au 17ème siècle sous l’ordonnance de Marie de Médicis; le dôme Saint-Benoît, ancienne chapelle avec sa curieuse coupole, qui est devenu le mausolée de la famille d’Ornano, liée à l’histoire de la ville. Enfin, pour les gourmands, sachez que la région d’Aubenas est réputée pour sa fameuse crème de marrons d’Ardèche. Cette divine spécialité est dignement représentée à Aubenas par les confiseurs Sabaton et Imbert parmi les plus connus.

Aubenas: le chateau.
Aubenas: place et halle couverte.

Une fois quitté la périphérie d’Aubenas, la petite D259 commence à grimper en lacets vers le nord-est, dans un paysage vallonné de prairies et de bois; au loin, des falaises striées de basalte se dessinent sur l’horizon. C’est ce qu’on appelle le plateau du Coiron, et les panoramas y sont de toute beauté. On se trouve entre 500 et 700 m d’altitude. Mirabel, c’est un petit village perché au coeur de ce plateau. Par temps clair, le regard peut porter jusqu’aux Cévennes! Pas très étendu, avec quelques petites ruelles calmes et sa petite église; mais sa particularité est qu’il est bâti au pied d’un éperon rocheux basaltique, au sommet duquel se dresse un massif donjon, l’unique vestige l’ensemble fortifié, constitué jadis de deux châteaux, l’un “catholique”, l’autre “protestant”. Le donjon est ce qui reste du château protestant, détruit au 17ème siècle sur ordre de Richelieu. Il a une drôle de tête, ce donjon, avec sa couleur noire due au basalte et ses angles clairs en calcaire; je sais pas ce qui me passe par la tête, sur le coup je trouve qu’il a l’air…d’un frigidaire géant (ne te fous pas de moi, ça y ressemble un peu, non..?).

Mirabel: le village et le donjon.