Et me voilà reparti pour de nouvelles aventures à travers la Grèce “continentale”. On a en déjà vu pas mal depuis l’arrivée à Athènes, hein? J’avais clôturé le premier opus du voyage par un arrêt et une nuit à Nauplie, dans le Péloponnèse. Je vais poursuivre la découverte de cette magnifique région, avant de la quitter en franchissant le golfe de Corinthe et continuer vers la Grèce centrale. La mer, la montagne, les sites antiques… il y en aura pour tous les goûts!
Epidaure et Leonidio.
Je quitte Nauplie de bon matin pour arriver, un peu comme à l’Acropole, aux premières heures d’ouverture d’un autre site antique de première importance en Grèce. 35 km suffisent à l’atteindre, au milieu de beaux paysages alternant petites montagnes boisées et champs d’oliviers; d’ailleurs, la réputation de l’huile d’olive grecque n’est plus à faire! J’arrive enfin aux abords du site d’Epidaure, dont le grand parking, bien souvent envahi par une armada d’autocars, affiche clairement la vocation ultra-touristique de l’endroit. Bien que le site vienne à peine d’ouvrir, il y en a déjà trois de garés, ils ont déjà deversé leur cargaison…
Quand on dit Epidaure, le premier mot qui vient à l’esprit, c’est théâtre. Des théâtres antiques grecs, il y en a un sacré paquet, mais le théâtre d’Epidaure, c’est du gros dossier. Il est superbement conservé, sans doute grâce à tous ces arbres qui l’ont recouvert et protégé jusqu’à sa redécouverte au 19ème siècle. Et on ne peut que lâcher un sifflement de stupeur quand on se trouve face à ce monstre de pierre, dont les gradins pouvaient acueillir pas moins de 12.000 spectateurs! Il est aussi réputé pour son acoustique exceptionnelle: les gens perchés dans les plus hauts gradins pouvaient entendre une conversation venant de tout en bas. Les groupes de touristes, sous la houlette de leur guide, font des démos un peu connes, genre se mettre en cercle et taper des mains en cadence. Ah la la, un rien les amuse…




Mais le site d’Epidaure, ce n’est pas que le théâtre, c’est aussi un sanctuaire hautement symbolique pour les grecs et… les médecins. C’est le sanctuaire d’Asclepios, dieu de la médecine et fils d’Apollon, rien que çà! Des milliers de pélerins se rendirent à Epidaure, convaincus des immenses pouvoirs de guérison d’Asclepios. Pouvoirs qui n’ont pas plus à Mister Zeus en personne, qui voyait son art de guérison comme une menace pour la “séparation” des humains et des dieux (on prétend qu’Asclepios a même pu ressuciter des morts); alors ni une ni deux, il a foudroyé le dieu guérisseur, malgré les protestatiions de papa Apollon. Asclepios utilisait des serpents (inoffensifs) dans ses “rituels” de guérison, c’est pour celà que le symbole du serpent se retrouve dans l’emblème actuel de la médecine, le caducée.
Il n’en reste plus grand-chose malheureusement, c’est difficile de s’en faire une idée concrète. À côté des vestiges du sanctuaire, le stade, lui, est encore bien visible, avec ses gradins et ses lignes de départ et d’arrivée symbolisées par des dalles de pierre.








Bon, un peu de sérieux, et quittons ce vaste paking où les autocars commencent à prendre leurs aises. J’ai un bout de route de 80 km à tailler, en repassant par Nauplie et en longeant ensuite la côte est du Péloponnèse. Cette route côtière est de toute beauté, épousant les contours de la côte avec quelques virages très harmonieux; les panoramas sont sublimes. Mais il y a aussi ce moutonnement de collines boisées, ces champs d’oliviers, ces petits villages côtiers qu’on traverse en deux minutes… Il y a autre chose aussi qui attire mon attention: ces toutes petites chapelles disséminées en bord de route, certaines débordant de couleurs, d’autres abandonnées, rouillées… Certaines ressemblent à une boîte aux lettres ou à un gros gâteau de mariage! J’en rencontrerai des dizaines à travers le pays, et je suis convaincu qu’il doit y en avoir des milliers! Elles abritent soit une photo, pour commémorer une victime d’accident, soit une icône de saint protecteur si la personne en est sortie indemne. Une lampe à huile y brûle souvent. Autant d’accidents en Grèce? Ça fait froid dans le dos… mais une troisième explication se dirige vers le culte purement religieux de tel ou tel saint.





Chemin faisant, je quitte l’Argolide pour entrer dans le nome de l’Arcadie. La route va provisoirement s’éloigner de la côte pour longer une très impressionnante barre montagneuse, dont certaines nuances rougeâtres pourraient un peu évoquer l’Estérel. Et au pied de ces falaises (qui font le bonheur des grimpeurs!), s’étire le village de Leonidio (Λεωνίδιο), où je vais faire un stop.
Le décor est vraiment magnifique, le village étant bordé de deux côtés par les montagnes et traversé par une rivière à sec. Hormis les dingos d’escalade, Leonidio ne voit pas passer trop de touristes. Et ça se voit, il règne encore ici une vie de village hors des sentiers battus; les enseignes de commerces et de restos sont presque toutes en grec, les vieux sirotent leur ouzo en terrasse, et j’ai même vu le pope orthodoxe du village entrer dans un petit bar (pour y boire quoi, alors là j’en sais rien). La petite station-service a encore des pompes avec le déroulement des chiffres à l’ancienne, et sa petite boutique est un bordel sans nom.






Ça me plaît bien, cet atmosphère si tranquille, bien loin de la folie touristique de l’Acropole! Pour manger un bout, c’est pareil, dans ce petit snack-bar, la carte est en grec et puis c’est tout! Allez, un souvlaki gyros (au moins c’est facile à commander) vite fait. Je ne m’en lasse pas, le souvlaki que tu as mangé hier ne ressemble jamais à celui d’aujourd’hui; chacun sa touche personnelle, je supose? Presqu’en face, une petite boulangerie qui ne paie pas de mine. Je vais y aller “au visuel”, car je reconnais quelques délices rencontrés à Athènes. Une grosse part de galaktomboureko fera largement l’affaire! Je me balade ensuite encore un peu dans les ruelles du “vieux” Leonidio avant d’aller voir les alentours.







Malgré cette impression d’être en pleine montagne, la mer se trouve à peine à 4 km d’ici! C’est une belle occasion pour aller voir le tout petit port de Plaka, tout mignon avec sa petite plage de galets er sa petite église blanche.



En plus des montagnes, les alentours de Leonidio sont envahis par les champs d’oliviers et d’arbres fruitiers tels les figuiers ou les orangers. C’est vraiment un joli ensemble. Mais une toute petite route va m’amener vers une étonnante trouvaille. Elle se mérite, cette route, c’est vraiment le chemin de montagne dans son aspect le plus tordu, avec son étroitesse, sa forte déclivité, ses virages en épingles (qu’il faut parfois passer en 1ère) et ses nids-de-poule! Ajoutes à celà des chèvres qui traversent devant toi en t’ignorant royalement, et tu déduiras vite qu’il ne vaut mieux pas avoir le permis depuis 2 jours pour s’y aventurer… Le paysage se fait de plus en plus dégagé et soudain on ne va pas plus loin, c’est un cul-de-sac. Mais la vision à laquelle j’ai droit dépasse tout: un vieux monastère tout de blanc vêtu, agrippé à la falaise tel un tableau sur un mur. C’est le monastère Agios Nikolaos Sintza, bâti au 16ème siècle et toujours habité.






De Leonidio à Monemvasia.
Je vais à présent me diriger peu à peu vers le sud du Péloponnèse, en laissant Leonidio derrière moi pour une route montagneuse qui suit plus ou moins le cours de la rivière à sec, qui ressemble maintenant à une petite gorge. Les paysages sont toujours aussi chouettes et l’environnement démontre encore la topographie très montagneuse du pays. Ici et là, une petite chapelle se dresse en bord de route; il y en a partout, c’est incroyable. Je me demande si il existe une “banque de données” qui les répertorie!


Il y a encore un sacré monastère à voir sur ce parcours: le monastère d’Elonas, qui n’est pas mal non plus dans son genre, adossé à une falaise rouge et accessible par un escalier taillé à flanc de montagne, celle-ci peinte en partie à la chaux. C’est un oasis de tranquillité (enfin ça dépend des jours) avec son patio fleuri, son bâtiment à deux étages et sa petite église abritant une icône de la Vierge (dérobée en 2006 mais retrouvée et restituée quelques semaines après, ouf!). L’origine du monastère n’est pas banale: en 1769, un berger aperçoit une lumière dans le coin, on se doute bien que c’était pas des phares de bagnole; suite à quoi des moines dégotent la fameuse icône à la source de ladite lumière. C’est de là que tout est parti! En tout cas l’endroit est féérique.




La route grimpe encore, la température descend un peu (c’est pas désagréable par ailleurs) et les sapins commencent à monopoliser le relief. Un petit village de montagne apparaît: c’est Kosmas (Κοσμάς), magnifique avec sa petite place où quelques bars sont ombragés par de gros platanes, et ses petites ruelles pavées. La traversée de Kosmas peut être compliquée en cas de croisement, c’est plutôt étroit.





Et c’est maintenant parti pour une longue descente vers la mer, à travers des paysages toujours aussi beaux, alternant montagnes, oliviers ou décor plus minéral et aride, quoique de temps en temps la végétation se refasse plus dense. Je change aussi de nome: je quitte l’Arcadie pour la Laconie! De “Laconie” au mot “laconique”, il n’y a qu’un pas: les habitants de cette région étaient réputés pour être plutôt taiseux et brefs dans leurs propos. Un exemple fort: un jour, le roi de Macédoine écrivit aux Spartiates (*): “Si j’envahis la Laconie, vous serez chassés”; leur réponse: “Si…”. À quoi bon les longs discours? (* Sparte fait partie de la Laconie).
Le liséré bleu de la mer apparaît enfin! Ma destination, en même temps que mon étape de cette nuit, se rapproche. Et voici que presque sans prévenir, en longeant la côte apparait au loin, dans toute sa splendeur, un gigantesque rocher qui pourraitêtre un cousin hellénique de celui de Gibraltar. Le spectacle va bientôt commencer: je vais te faire découvrir la vieile ville fortifiée de Monemvasia (Μονεμβάσια), un des endroits les plus fantastiques du Péloponnèse, et oserai-je dire, de toute la Grèce!
En traversant la partie moderne de Monemvasia, appelée Gefyra (Γέφυρα), je me retrouve devant une longue digue qui va longer la mer sur 1 km. Le rocher est là, juste en face, on prend son gigantisme en pleine face, d’un seul coup! On peut se garer gratos le long de cette digue (bonne nouvelle, çà!), le plus dur consistant à trouver une place; c’est jouable, même si on peut se trouver un peu loin de la vieille ville. Maintenant pour les mous du mollet, il y a des petites navettes pas chères ou des taxis… plus chers.

à contre-jour.

C’est au pied de ce rocher hors-normes que se trouve le Kastro, autrement dit la vieille ville de Monemvasia. Son entrée fortifiée et les remparts vénitiens (encore eux!) qui escaladent le rocher constituent déjà un bel avant-goût de ce qui nous attend! Mais viens, je vais pas te faire trépigner, entrons dans le Kastro. Au moins déjà, je ne serai pas embêté par les voitures, elles n’ont pas droit de cité intra muros! Voici la rue principale, bordée de quelques restos et autres boutiques de souvenirs. Il ne faut pas s’arrêter à cette première impression, car finalement la vieille ville n’a pas vendu son âme au tourisme de masse. Alors oui, il y a un tas d’hébergement, il y a du monde; Mais l’aspect médiéval du Kastro n’a pas été défiguré, et il suffit de se perdre dans une venelle discrète ou se faufiler sous un passage voûté pour se retrouver seul(e) au monde.





Heureux élu que je suis, passer la nuit dans ce décor de rêve est vraiment un privilège! D’autant plus que ma chambre airbnb, toute en boiseries et mobilier d’époque, me donnera le sentiment d’être un “VIP” de l’époque médiévale en visite. Mon merveilleux hôte Byron s’occupe d’un petit bar à vins et propose des dégustations de cépages grecs méconnus; en complément des vins de Némée, allez pourquoi pas? Un chat aussi malicieux que gourmand réussira même, d’un perfide coup de patte, à me piquer un amuse-bouche. Non mais sans blague?! Mais non, je ne lui en veux nullement!

Déambuler dans le Kastro est un rêve éveillé. Il faut errer sans but, prendre une ruelle pavée, passer sous un vieux porche, repérer une des multiples petites églises byzantines disséminées intra muros (hé oui, en plus des vénitiens, les turcs sont passés par là aussi)… De toute façon, les touristes de passage restnent sur la rue principale pour faire leur petit shopping. Et le sentiment de bien-être est sublimé par la totale abscence de bruits de moteurs!






Et la mer, dans tout cà? Elle n’est jamais bien loin, on peut la longer en suivant le chemin de ronde des remparts. Mais ni plage de sable ni transats et parasols ici, c’est tant mieux d’ailleurs! Si on veut faire bronzette ou trempette, il faut aller à Gefyra. superbe et scintillante mer, dont les vagues s’écrasent directement sur le rocher! Un petit escalier dérobé permet quand-même de l’approcher. Maintenant retourne-toi: en face de toi, c’est pas mal non plus, avec les vieilles maisons aux teintes diverses (du rose, de l’ocre, du gris…) et la falaise escarpée en arrière-plan. Et avec les jeux de lumière, selon l’endroit où l’on se trouve, ces teintes ont l’air de se foncer ou s’éclaircir.






J’arrive à l’autre extrémité du Kastro, où les remparts repartent à l’assaut du relief comme une mini-muraille de Chine, percés d’une autre petite porte de pierre, plus modeste et surtout moins fréquentée, les touristes-qui-ne-restent-pas-longtemps ne venant pas jusqu’ici. Un petit sentier conduit à un petit phare, qui est encore habité, à juger par ce fil où sèche du linge! Le décor est très minéral, et au loin les fortifications me font repenser à celles de Ston en Croatie. Tiens, ces plantes à longue tige avec ce bulbe rond et violet, c’est quoi donc? J’en écrase une entre mes doigts, ça sent l’ail! En fait c’est de l’ail des vignes, qui est comestible et très joli dans ce décor!






Mais, au sommet de ce méga giga caillou, il y a quelque chose à voir? Bien sûr que oui! C’est justement à quoi je vais maintenant m’intéresser. En surplomb du Kastro, un petit sentier, pas toujours bien sécurisé, passe derrière les plus hautes habitations. À un moment, il croise une rampe grossièrement pavée qui va passer sous une porte fortifiée. C’est ici que Monemvasia livre encore une autre de ses facettes: là-haut s’étendent les ruines de l’ancienne “ville haute” du Kastro, plus ou moins bien conservées, dont le vaste château et une ancienne citerne. En revanche, l’église byzantine Agia Sofia a beaucoup d’allure.





Naturellement, le panorama du sommet du rocher, sur la mer et le Kastro, dépasse toutes les espérances. Attention toutefois à pas trop s’approcher du bord, il y a quand-même quelques mètres jusqu’à la mer! Et aussi à rester sur les sentiers, car certaines petites citernes sont cachées par les herbes et pas signalées. On peut se demander pourquoi cet immense rocher s’est retrouvé isolé comme çà; celà date d’un violent tremblement de terre en 375 av. J.-C qui est parvenu à le désolidariser du continent et à en faire une presqu’île.
Il est possible de redescendre par d’autres petits sentiers, mais attention aux gros cailloux et pavés polis par les nombreux passages; ils peuvent déjà être un peu glissants par temps sec, alors en temps de pluie, çà doit devenir sérieusement casse-gueule! En tout cas j’aurai passé un bon moment au Kastro de Monemvasia, que les touristes commencent peu à peu à quitter en fin de soirée. Moi je reste, en poursuivant le rêve avec une nuit princière dans une chambre hors du temps…



La côte est du Magne.
Je quitte le Kastro pour récupérer la voiture, qu’au final j’avais garé plus près de Gefyra que de la ville fortifiée. Gefyra, c’est la partie moderne de Monemvasia qui, sans posséder de buildings façon Benidorm (ouf!), n’a nullement le charme du Kastro. Néanmoins le petit port n’est pas désagréable à regarder, et surtout la vue sur le rocher y est fantastique. On y trouve un tas de petits bars, restos et autres commerces; une boulangerie proposant des petits-déj’ sera l’endroit idéal pour bien démarrer cette journée!



Je vais maintenant continuer vers le sud, en longeant cette belle côte qui réserve bien des surprises. Mais un truc m’intrigue: pourquoi certaines voitures serrent-elles si fort à droite, à cheval sur la bande d’arrêt d’urgence? Un excès d’ouzo, un coup de fatigue? Non. C’est une des spécificités de la conduite à la grecque: les conducteurs plus lents se déportent exprès pour ne pas gêner le flux de circulation plus rapide qu’eux! Pourquoi pas?
La route est toujours aussi belle, et la mer jamais bien loin. Comme je le disais sur un précédent carnet, il suffit parfois de tourner la tête 2 secondes sur le côté pour repérer un détail que tu n’aurais jamais capté. C’est le cas à l’instant: échouée sur une plage de sable, j’aperçois une épave de navire, toute rouillée. Je retrouve facilement la plage où elle se trouve, c’est la plage de Glyfada. Ce bateau, c’est le Dimitrios, qui s’est échoué là en 1981. Il a son petit succès, dommage qu’il soit tant tagué…



Je te parlais de surprises, ça tombe bien car j’arrive à Gýthio (Γύθειο), un petit port de pêche d’une grande beauté, où de vieilles maisons à balcons en fer forgé se mirent dans la mer, juste en face. D’autres maisons partent à l’assaut des collines en arrière-plan, dans un décor qui a le mérite de ne pas être enlaidi par de vilaines constructions genre hôtels-dortoirs pour touristes. Et puis, se balader le long du port, où les barques dansent au gré des flots et les poulpes sèchent sur des cordes, est un vrai régal! Un tableau idyllique, on est d’ccord, hein? D’autant plus que l’endroit n’a pas encore été immolé sur l’autel du tourisme de masse.






À 500 m du port, la petite presqu’île de Cranae abrite une vieille tour fortifiée et une église byzantine. Gýthio offre encore son petit lot de trouvailles, comme sa place principale, populaire et animée, et même un petit théâtre antique, bien conservé mais dont l’entretien laisse à désirer. Et tiens, il y a même deux periptero, pour qui voudrait acheter un peu de tout pour pas cher!





Gýthio, c’est aussi la “porte d’entrée” d’une des plus belles régions du Péloponnèse, et même de Grèce. Je m’apprête à pénétrer dans le Magne, qu’il est inconcevable de ne pas visiter quand on visite le Péloponnèse! On est ici dans le sud de la région, au niveau de ces sortes de grosses excroissances que certains appellent les “doigts” ou les “pis de vache” (je voudrais voir la gueule des vaches avec de tels pis!) du Péloponnèse. Le Magne est l’excroissance du milieu. Attention, le Magne est une région, pas pas un nome: il est “à cheval” entre la Laconie et la Messénie.
Alors, la Grèce, que des montagnes, des oliviers et des maisons blanches à volets bleus? Non, dans le Magne, il faut balayer tout çà d’un revers de main. Bon, même si le nord du Magne a parfois un relief escarpé, le sud est bien différent. Les paysages sont plus vastes, plus arides, voire désolés comme des steppes, avec une végétation qui se raréfie et une nature sauvage. Plein de petits chemins filent au hasard, longeant des murets et traversant des petits villages à maisons de pierre. Une autre spécificité du Magne, c’est la présence de tours fortifiées, datant du 16ème siècle, dans le moindre petit bourg. Ça m’a rappelé, dans une moindre mesure car elles sont plus modestes en Grèce, les tours italiennes de Bologne ou San Gimignano en Toscane. Oui vraiment, une région aux paysages étonnants, bien différents des idées préconçues sur le pays.

Et maintenant, place au spectacle visuel… Je vais égréner un komboloi géant, où les grains seraient des petits villages et hameaux pleins de charme, où de vieilles et solides maisons de pierre côtoient ces fameuses tours fortifiées, au milieu de paysages où on se prend à se poser la question: “mais on est toujours en Grèce, ici?”.
Je passe par Kotronas (Κότρωνας), avec sa petite plage et ses terrasses (j’y verrai mes premières tours!), et le minuscule hameau de Loukadika (Λουκάδικα), d’où le panorama sur la côte est génial. Oh, il y a bien encore quelques oliviers par ci par là, mais ils commenceront à se raréfier vers le sud. En tout cas cette région est magnifique!








Le Magne, si sublime soit-il, ne souffre pas du tourisme de masse; les routes sont peu fréquentées, et je n’ai croisé qu’un petit nombre de véhicules. Jen’ai aucune raison de m’en plaindre, c’est clair! Par contre, j’ai quelquefois aperçu des vieilles maisons, des petits corps de ferme complètement abandonnés, portes et fenêtres ouvertes à tous vents. Exode rural? Difficulté de la vie quotidienne dans cet environnement? Je sais pas. Ça rajoute encore une petite touche d’étrangeté quand on évolue dans le Magne… Voici le village de Flomochori (Φλομοχώρι), sans doute un des plus jolis du coin. Un bar, une supérette, des ruelles pavées et fleuries, et une concentration de tours plutôt importante pour une si modeste localité; maus ausi: pas de boutiques de souvenirs, pas d’autocars à touristes pressés… Le pied, quoi!









Les points de vue sur la côte se multiplient, rivalisant de beauté, et le paysage va commencer à se faire plus aride, plus “pelé”. C’est vraiment étonnant d’évoluer dans un tel décor, qui te donne un sentiment mixé d’immensité et de solitude. Les villages sont de plus en plus dispersés; je passe par Lagia (Λάγια), avec ses quelques tours et ses maisons de pierre (dont certaines sont en sale état, dommage).





J’ai presque l’impression de me rapprocher d’un petit “bout du monde”, au milieu d’un paysage désolé et venteux et de panoramas sur la mer à se damner! Une petite route en lacets descend vers le hameau de pêcheurs de Porto Kagio (Πόρτο Κάγιο). Le lieu est d’une beauté renversante, et ici ça a l’air de se savoir: il y a quelques bars et restos, et davantage de monde que dans les petits villages! Mais ça ne sature pas et ça reste vivable. Je suis presque à l’extrémité sud du Magne, je vais par la suite remonter par sa partie ouest.








La côte ouest du Magne.
Ne t’imagine pas que le paysage va devenir monotone et que cette succession de petits villages va te faire baîller d’ennui, oh que non! Le Magne a bien plus d’un tour dans son sac! reuve en est que, 5 km après Porto Kagio, au détour d’un virage, apparaît un étrange village perché sur une colline. Son aspect est vraiment particulier, on dirait que toutes les tours fortifiées du Magne s’y sont donné rendez-vous. Mais en se rapprochant, quelque chose semble clocher: l’état de certaines bâtisses. Un village-fantôme? Pas tout à fait. Vathia (Βάθεια) est en partie abandonné, c’est un fait, mais certaines maisons on été patiemment restaurées et le bourg renaît doucement de sa léthargie. C’est vrai que certaines habitations sont encore en piteux état. On dirait un peu un “mini” Monemvasia dont les habitants se seraient carapaté depuis un bout de temps… Curieuse sensation que d’y errer au hasard.








Les points de vue sur la mer sont toujours aussi magiques, et la végétation reprend peu à peu ses droits. Tiens, un petit village côtier se profile au loin, je vais voir çà de plus près! Gerolimenas (Γερολιμένας) est un joli petit port, avec quelques restos et des maisons de pierre quasi les pieds dans l’eau (euh, une maison avec des pieds, il raconte quoi lui??). Enfin que soit, c’est un endroit charmant, entouré de montagnes car le relief se fait de nouveau plus prononcé en revenant vers le nord.




Ça a été une journée intense et riche en découvertes, et elle commence à tirer vers sa fin; la ville où je ferai étape cette nuit, entre mer et montagne, s’appelle Areópoli (Αρεόπολη). C’est la deuxième ville du Magne après Gýthio, et attention à ne pas se gourer en disant “Aeropoli”! C’est Areópoli et puis c’est tout!
Il ne faut pas se laisser décourager par l’arrivée en périphérie, avec ses supermarchés et ses stations-service; c’est pas pour çà qu’on vient, donc on s’en fout un peu, sauf si ton réservoir est à sec… Alors, que nous réserve cette petite cité d’Areópoli (qui tire son nom du dieu de la guerre Arès)? Il faut reconnaître que la vieille ville a du charme, avec ses ruelles pavées ou dallées, ses maisons de pierre et son église dite “des Taxiarques” (où ce soir, une cérémonie de mariage prenait juste fin, les convives se dispersant sur la place). Mais c’est très touristique, ça casse un peu le tableau: pas mal de monde, restos racoleurs, bars à forte musique… Tous les touristes du Magne se sont-ils donné rendez-vous ici? Et la vaste place principale, entourée de bars et de boutiques à souvenirs, n’est pas un modèle de beauté; allez, à sa décharge, y a quand-même un immuable periptero, où on trouve presque tout (c’est un pléonasme, çà…).








En soirée, ça se vide un peu, et quand bien même il est facile de s’éloigner un peu de cette agitation en se perdant au hasard de ruelles moins fréquentées, dont les murs disparaissent parfois sous les fleurs. Mais je n’ai pas retrouvé ici la sérénité des petits villages du Magne. Mais ne crachons pas dans la soupe, Areópoli demeure une très belle cité où il faut s’arrêter lors de l’exporation de cette région du Péloponnèse!








Mystrás: un site magique près de Sparte!
Avant de mettre le cap vers le centre du Péloponnèse, après avoir quitté Areópoli j’ai encore l’occasion de faire un ou deux petits stops le long de la côte; par exemple à Limeni (Λιμένι), un petit port sympa qui ressemble un peu à Gerolimenas mais un poil plus huppé peut-être, ou encore à Neo Itilo (Νέο Οίτυλο), pas mal aussi mais que j’ai trouvé un peu léthargique.





Les paysages arides du Magne s’estompent rapidement, pour refaire place à des prairies et d’innombrables plantations d’oliviers. Et peu à peu je me rapproche d’une ville mythique, qui a fait trembler la Grèce entière et même défié l’Empire Perse: Sparte (Σπάρτη)! Oui, rien qu’à ce nom on repense au film “300” de Zack Snyder, ou encore à cette rivalité viscérale qui l’a opposé à Athènes. Athènes et Sparte, c’était un peu le PSG et l’OM… elle a connu une Histoire légendaire, faite de dominations, de victoires… Mais rien n’est éternel: en 371 av J. -C, Thèbes finit par venir à bout de la “machine” spartiate lors de la Bataille de Leuctres. Sparte ne s’en relèvera pas. Et dire qu’elle n’a jamais voulu s’entourer de remparts, car d’après Lycurgue, un législateur spartiate: “une ville bien défendue est celle qui est entourée d’un mur d’hommes, et non d’un mur de briques”.
Sparte était aussi réputée pour son éducation à la dure dès le plus jeune âge, qui ferait passer la Légion Étrangère pour un jardin d’enfants. Dès 7 ans, les gosses recevaient une éducation majoritairement axée sur la guerre et les armes, et ça ne rigolait pas: des rations minables de nourriture (le chapardage d’aliments était même encouragé pour leur forger le caractère!), une tunique par an pour se vêtir, seulement de l’eau froide pour se laver… Et à partir de 12 ans, ça allait crescendo avec les initiations aux armes et les concours sportifs. Celà pouvait durer jusqu’à l’âge de 30 ans, pour finalement devenir ces combattants quasi indestructibles qui ont fait la légende de Sparte. Il faut dire aussi que les enfants chétifs et malformés étaient éliminés, précipités du haut d’une falaise; ça fait froid dans le dos.
Le traité de paix qui mit officiellement fin à la guerre du péloponnèse (donc entre Athènes et Sparte, on s’en doute) fut seulement signé en…1996! Non, c’est pas une blague. En 404 av J. -C, Athènes, au pied du mur, avait accepté de conclure une armistice avec Sparte. Mais le traité de paix n’avait jamais été signé. Un “oubli” (tu parles!) que les maires d’Athènes et de Sparte ont réparé. Vaut mieux tard que jamais? L’expression prend tout son sens, là!
Bon maintenant, pour être plus terre-à-terre, la Sparte actuelle est une ville plutôt terne et moderne. Des ruines? Très peu ont survécu au fil du temps. Il y a bien la statue du roi Leonidas devant le stade, mais à part çà… Donc désolé si le mythe est écorné, mais c’est pas forcément la peine de s’y attarder. Mais le lot de consolation sera vraiment à la hauteur, à 5 km à peine de là…

L’ancienne Cité de Mystras (Μυστράς) n’est clairement pas un site archéologique comme les autres qu’on peut voir dans le pays! Les blocs de marbre, les colonnes, on oublie tout çà ici! Cette vaste ville-fantôme, fondée au 13ème siècle par le Franc Guillaume de Villehardouin, a connu diverses invasions: turcs, vénitiens , albanais… La construction de la ville moderne de Sparte au 19ème siècle sonna le glas de la cité, les habitants de Mystras allant s’installer à Sparte. Abandonnée depuis, restaurée par morceaux (çà prend du tems!), Mystras est classée au patrimoine de l’Unesco en 1989.
La visite est exceptionnelle, certains bâtiments ont été magnifiquement préservés. Toute la prestance et la majesté de l’architecture byzantine sont ici à leur niveau maximum! Seulement attention: le site est vaste et s’étale sur un rocher, avec des bonnes déclivités. Donc ça grimpe, parfois sec, malgré les marches taillées dans la pierre! Il y a ici deux parkings, un “en bas, l’autre “en haut”. Alors soit tu commences par le bas et tu visites tout en faisant la grimpette, soit tu peux conserver le billet d’entrée et te porter en voiture jusqu’au parking d’en haut; c’est toi qui voit!




Je commence par la “ville basse”. Pas trop saturé de monde, quoiqu’il y ait deux ou trois groupes; mais comme le site est grand, je pense que les gens sont bien dispersés. Tout de suite je suis en immersion dans le style byzantin. Voici le complexe religieux de la Métropole, avec l’église Agios Dimitrios, ses fresques et ses petits cours fleuries à arcades. Pour qui aurait la gorge sèche à cause de la chaleur, il y a là une petite fontaine (il y en a une autre au monastère de Pantanassa, plus haut). Un peu plus loin, le monastère de Vrontochion était considéré comme le centre culturel de Mystras.







À partir de maintenant, ça va commencer à monter, par des escaliers taillés dans la roche ou des sentiers pierreux. Je dépasse un groupe ahanant qui a l’air de marcher au ralenti dans la pente (certains avec des bâtons de marche, ne me perforez pas le pied, merçi), et j’atteins le monastère de Pantanassa, joli avec sa cour fleurie, qui est encore habité par des religieuses, qui ont d’ici une vue incroyable sur la plaine de Sparte. Ces dernières vendent par ailleurs des icônes et des broderies. Pour rappel, une fontaine permet se se ravitailler en H₂O (en eau, quoi! On sait jamais, y en a peut-être qui roupillaient aux cours de chimie 🧪).




L’air de rien, voilà que j’atteins la “ville haute”, au milieu de ruines éparses de maisons et de petits palais. En parlant de palais, en voilà un bien impressionnant: le Palais du Despote, en pleine phase de restauration lancée par l’Unesco. Il est pour l’instant inaccessible, et il y a visiblement encore du boulot! Au fait, pourquoi “despote”? Hé bien, Mystra fut jadis la capital du despotat de Morée, ancienne province de l’Empire byzantin. En gros, un despote est un souverain qui s’arroge un pouvoir absolu, arbitraire, en alimentant souvent un climat de crainte. Y en a encore quelques-uns qui traînent sur notre pauvre petite planète…






Encore plus haut (allez les mollets, vous pouvez le faire!), l’église Agia Sofia était l’église “rattachée” au palais du Despote. Elle est bien jolie, et les fines colonnes qui se dressent devant son entrée lui donne un petit air de fragilité. Elle abrite de belles fresques. Et en surplomb, en guise de point culminant du site, les vestiges du Chateau des Francs dominent tous les alentours. Voilà voilà! Reste plus qu’à tout redescendre, pas trop vite pour éviter de se casser la figure, tout en slalomant entre les groupes montants ou descendants qui ressemblent à des colonnes de chenilles processionnaires.




Pour manger, je ne vais pas revenir vers Sparte, mais aller un peu au hasard dans les alentours, où se cachent quelques petits villages tranquiles,encore préservés du passage des cars de tourisme (de toute façon les routes sont tellement étroites!). Je m’arrête à Pikoulianika (Πικουλιάνικα), qui se résume à quelques maisons et une jolie petite église, ainsi que deux ou trois restos qui au moins ne font pas dans le tape-à-l’oeil. Celui que je choisis a une superbe terrasse qui offre une vue sur la plaine de Sparte qui ferait même rougir Mystras! Ah ben je n’ai pas encore testé les fameuses dolmades, ces feuilles de vignes farçies de légumes, d’oignons ou de riz, c’est l’occasion! Ensuite, de la viande de porc marinée aux p-d-t, le tout arrosé d’une bonne bière locale appelée Sparta (ça me paraît logique). Un chouette repas avant de repartir vers de nouvelles aventures! Le nom du resto: Ktima Skreka (Κτήμα Σκρέκα).




Dimitsana et Stemnitsa, le Péloponnèse côté montagne.
En remontant encore plus vers le nord du Péloponnèse, je reviens dans le nome d’Arcadie. Après une monotone partie de route en voie rapide, je retrouve vite les petites routes bucoliques, qui serpentent au milieu d’une végétation qui s’étoffe de plus en plus. Quel contraste avec le Magne! Les parcelles de cultures, les oliviers, et même des cyprès qui m’évoquent la Toscane. Par contre, côté météo, ces nuages noirs au loin ne présagent rien de bon, et je vais droit dedans! La pluie finira par s’y mettre… ainsi que l’orage. Mais en milieu montagneux, le temps n’en fait toujours qu’à sa tête!


La route devient plus sinueuse, commence à grimper et offre des paysages de plus en plus beaux. J’atteins le village de Stemnitsa, que j’outrepasse vu que j’y passerai la nuit, donc je t’en parle ultérieurement. Je rallie donc le prochain village, distant de 8 km, sous une pluie soutenue sans être diluvienne, avec cà et là un éclair et un coup de tonnerre. Tu parles d’un “son et lumière”! Celà ne m’empêche pas d’arriver à Dimitsana (Δημητσάνα), village montagnard typique d’Arcadie, séparé en deux par la route qui fait un lacet. C’est ici un Péloponnèse moins connu, plus authentique. Un tas de ruelles pavées qui montent, des maisons de pierre aux tuiles rouges et aux balcons en bois, des petits commerces et bars (comme à Leonidio, je verrai encore un pope sortir de l’un d’eux, décidemment!)… tout çà au milieu d’un paysage montagneux assez boisé.
Tout çà aussi… sous la pluie, heureusement que j’emporte toujours un petit vêtement coupe-pluie avec moi! Mais ça a son charme, la terre mouillée fait toujours remonter des senteurs du sol très agréables. Ah, un éclair, je vais compter les secondes… 1… 2… BROOMM!! Deux secondes?? Aïe, je suis en plein dedans, moi! Bah, cet orage finira bien par dégager. Moi, je me remets en route, vers Stemnitsa, mais avant çà, un petit plein d’essence pour mon destrier. Il est très facile de trouver une station-service en Grèce, même dans les petits villages. Avec celle de Dimitsana, on remonte 50 ans en arrière, avec les pompes aux chiffres qui défilent sur les cylindres, une mamie à cheveux blancs qui te sert, et une boutique remplie de bidons d’huile et de produits d’entretien voiture, rangés de façon pas très “conventionnelle”… Elle seule doit s’y retrouver!





La pluie diminue, c’est bien mais il y a encore un peu de brume et l’horizon est bouché. Ce ne sera pas optimal pour pouvoir admirer les gorges de Lousios, qui longent la route entre Dimitsana et Stemnitsa. Mais j’en aurai un meilleur aperçu demain matin. Ces gorges abritent quelques monastères cachés, je vais partir à la rencontre du monastère de Podromou. Il y a bien un sentier de rando qui longe les gorges, mais certains monastères peuvent se rallier en voiture. Pour Podromou, une petite route (attention aux moutons!) rejoint un petit belvédère en surplomb des gorges, d’où on entend bouillonner la rivière tout en bas. Après, un petit sentier descend en 30 minutes jusqu’à cet étonnant édifice du 12ème siècle, carrément accroché à la falaise; les bâtiments s’harmonisent tellement bien à la roche que c’en est presque irréel. Il est toujours habité par des moines et ouvert aux visites, sauf entre 13H et 17H..









Je n’ai ensuite que quelques km à parcourir pour rejoindre Stemnitsa (Στεμνίτσα), un autre petit village de montagne qui, bien qu’il ressemble à Dimitsana au niveau architectural (les maisons en pierre en tuiles rouges), n’en est nullement un “copier-coller”! Il est moins touristique et plus authentique que son voisin, du moins en semaine car les weekends pas mal d’athéniens aiment bien se balader dans le secteur! Il y a néanmoins une vraie vie de village ici, à travers ces petites ruelles pavées quelquefois casse-gueule, où sont disséminées ici et là quelques belles petites églises byzantines. Tu verras que souvent, les cloches se trouvent en-dehors de l’édifice, ou bien sur un campanile. Quant à l’église principale, la croix au sommet de l’édifice (pas de coq comme chez nous!) dispose d’un rétroéclairage quand vient la nuit! J’en verrai beaucoup comme çà dans le pays.




On dirait presque un petit village corse, non? Sur la place principale, l’église, un resto et deux bars, c’est pas compliqué. Le pope du village taille une bavette animée avec quelques villageois (les popes grecs sont toujours très accessibles auprès de leurs ouailles), deux gros chiens sont couchés en plein milieu de la route, si une voiture se pointe ils veulent bien faire l’effort de bouger, pour mieux se recoucher par après! Un autre truc frappant est que les jeunes n’ont pas déserté ces petits villages. Je me rappelle en 2016, dans l’Alentejo portugais, tous ces petits villages où je ne voyais que des vieux assis sur un banc; Ici en Grèce, toutes les générations sont bien présentes. Peut-être pas partout, je me doute, mais l’Arcadie n’a apparemment pas eu affaire à l’exode rural. C’est bien.
Et mon hébergement? Dans ces villages, pas d’hôtels modernes qui défigurent tout, mais des genres de chambres d’hôtes intégrées à l’architecture locale; tu verras souvent le nom archontiko pour désigner ces grosses bâtisses en pierre, parfois munies d’un balcon en bois ou en fer forgé. C’est justement dans un archontiko que je passerai une très bonne nuit (*le site en lien est en grec, mais il y a un bouton “translate”).
Le resto du village, où les touristes sont minoritaires, propose de la bonne et solide bouffe de montagne; la viande d’agneau rôtie est une des spécialités de la région, fondante à souhait et agrémentée d’une petite sauce au citron. En dessert, des raisins confits avec du sirop au miel. Pour une fois, ça me change des souvlakis! Et je me dis, au final, en rentrant me coucher en empruntant au hasard des ruelles sombres: “elle est bien loin, la Place Monastiraki d’Athènes!”






Olympie, le berceau des “Jeux”.
Grand soleil ce matin pour démarrer la journée, bien que la fraîcheur des montagnes soit encore bien présente (15°C!). C’est l’occasion de voir Stemnitsa et les gorges de Lousios sous un aspect plus agréable! Je pars vers l’ouest du péloponnèse, au gré de petites routes de montagnes et de petits villages qui, au fil des kilomètres, vont me faire quitter l’Arcadie pour me faire entrer dans un autre nome: l’Elide. Je constate avec tristesse que certaines grandes étendues de forêts on été carbonisées par des incendies, sans doute celles de 2021… Foutu changement climatique.


J’arrive enfin dans une ville pas très belle, avec des rues droites où s’enchaînent les resto et les boutiques à touristes. Pratique juste pour manger un souvlaki sur le pouce. Pourtant, il faut s’y arrêter quand on visite la Grèce, car le site archéologique qui se trouve à proximité, ce n’est pas concevable de “zapper” sa visite. Cett ville, c’est Olympie (Ολυμπία).
J’en mets ma main au feu, ça t’a déjà fait “tilt” dans la tête! Olympie, les Jeux Olympiques! Les tout premiers Jeux furent lancés en 776 av J.-C, avant d’être interdits au 4ème siècle, considérés comme des festivités païennes, par l’empereur romain Théodose (un peu con sur les bords, le gars). Les “Jeux” modernes renaîtront de leurs cendres en 1896, renaissance dont le principale artisan a été le Baron Pierre de Coubertin. La première édition moderne se déroula à Athènes.

Alors, ce mythique site d’Olympie? Des vestiges d’installations sportives? Oui, mais pas que! Le site était avant tout un centre religieux, avec un temple dédié au culte de Zeus, dont une incroyable statue de 15 m de haut, en bois, or et ivoire, représentait le dieu assis sur un trône. Cette statue était l’une des 7 Merveilles du monde antique. Déplacée à Constantinople, elle disparut dans un incendie au 5ème siècle. Du temple, il ne reste pas grand-chose, difficile donc de s’en faire une idée… Mais il devait être gigantesque!


À partir du grand parking, une large allée sinueuse conduit à l’entrée du site et à la billetterie. Il y a du monde, mais le site est vaste, ce qui permet aux visiteurs d’être bien dispersés. Pas mal de petits groupes scolaires, c’est bien de les imprégner de l’histoire de leur pays, et au moins ils se tiennent comme il faut sans courir et gueuler à tout va.
Je t’ai parlé du Temple de Zeus, il y a aussi le Temple d’Héra (Madame Zeus dans la vie), reconnaissable à ses trois colonnes encore debout. Ici aussi, il faut un sacré effort d’imagination pour se réprésenter le site entier dans son aspect d’origine!

Mais les vestiges relatifs aux Jeux Olympiques dans tout çà? J’y arrive. Ici aussi il faut vraiment les deviner, car ces champs de colonnes de différentes hauteurs me ferait parfois davantage penser aux colonnes de Bueren à Paris! Il y a le palestre, la salle d’entraînement des athlètes à l’époque, le Bouleuterion, là où les athlètes venaient prêter serment au début des Jeux, ainsi que des thermes. Et un stade aussi? Bien sûr, sans çà ce serait pas complet. On y accédait autrefois par un passage voûté, dont il reste un morceau. 45.000 spectateurs pouvaient s’y tenir, on voit encore la ligne de départ en marbre et les ruines des tribunes du jury.









La visite du site d’Olympie est incontournable pour appréhender encore plus l’histoire religieuse et sportive de la Grèce antique, même si certains vestiges ne sont pas très “parlants”. En guise d’excellent complément, le musée archéologique présente un tas d’objets découverts lors des fouilles du site (qui se poursuivent encore aujourd’hui), et le musée de l’Histoire des Jeux Olympiques, super instructif, qui décrit les différentes épreuves (courses, lancer du disque, lutte, pancrace (c’était un peu le MMA de l’époque), course de chars et autres) et démonte plein d’idées reçues qu’on pouvait se faire des Jeux antiques.
Dans l’Antiquité, il existait un “serment olympique” en 14 points.
I. Être sujet hellène libre, ni esclave, ni métèque.
II. N’être ni repris de justice, ni d’une moralité douteuse.
III. S’inscrire à l’avance au stage d’un mois du gymnase d’Elis.
IV. Tout retardataire sera hors concours.
V. Interdiction aux femmes mariées d’assister aux Jeux ou de se montrer dans l’Altis sous peine d’être précipitées du rocher du Typaion.
VI. Pendant les exercices, les maîtres (entraîneurs) des athlètes devront être parqués et nus.
VII. Défense de tuer son adversaire, ou de chercher à le tuer.
VIII. Défense de le pousser hors des limites.
IX. Défense de l’intimider.
X. Toute corruption d’arbitre ou d’adversaire sera punie.
XI. Tout concurrent contre lequel ne se présentera pas l’adversaire désigné sera déclaré vainqueur.
XII. Défense aux concurrents de manifester contre le public ou contre les juges.
XIII. Tout concurrent mécontent d’une décision peut en appeler au Sénat contre les arbitres : ceux-ci seront punis ou leur décision annulée si elle est jugée erronée.
XIV. Sera hors concours tout membre du Collège des Juges.
NOTE: le point V. du serment est hallucinant; ça rigolait pas avec les femmes à cette époque, et après on parle du machisme actuel! Cependant, il y avait quand-même des Jeux réservés aux femmes à Olympie : c’étaient les Jeux Héréens, donnés en l’honneur de la déesse Héra. Néanmoins, ils ne comportaient qu’une épreuve : une course de vitesse sur 160 m, c’est-à-dire les 5/6 du stade. Ça écorne le mythe, pas vrai?
D’Olympie à Delphes.
Tiens, par contre je n’ai pas précisé dans quelle région j’étais! Encore dans le Péloponnèse? Celà aurait encore été vrai avant 2011, année où les régions “historiques” furent remaniées pour recréer ce qui est maintenant appelé des périphéries (très “administratif” comme nom, c’est nul). Donc, en arrivant déjà à Olympie, je suis entré en Grèce-Occidentale; tu noteras que ça fait moins rêver que “Péloponnèse”…

Là, j’ai une grose portion routière à avaler, je remonte vers la Grèce-centrale en passant à proximité de Patras (où je ne ferai pas d’arrêt, désolé). Encore un changement de nome: je quitte l’Elide pour l’Achaïe. Je trouve qu’ils ont de jolis noms, les nomes grecs… Mais une fois passé Patras, voici que se dessine au loin la silhouette élégante d’un immense pont à haubans, genre de cousin grec du Pont de Normandie. C’est le pont Rion-Antirion, qui relie l’ancien Péloponnèse à la Grèce “continentale”. Inauguré en 2004, c’est le troisième plus long viaduc haubanné du monde (2283 m au total!).
Je vais franchir ce bras de mer, mais pour celà, je quitte la voie rapide juste avant le pont. “Alors, on ne passe pas sur le pont?”, me demanderas-tu. Hé bien non… Et comme je n’ai pas de voiture amphibie, j’imagine que les panneaux “Ferries” vont te mettre la puce à l’oreille. Malgré la construction du pont, le service de car-ferries fonctionne toujours, et il faut savoir qu’il est deux fois moins cher pour un véhicule que le péage du pont (dont la traversée coûte 13,50€, tu parles d’une douche froide), et puis, passer sous le pont, c’est une expérience fun à faire! En tous cas ces petits ferries ont une bonne bouille, et ont aussi leur petit succès parmi les chauffeurs de camion. On embarque et on paie une fois à bord, c’est bien pensé!




Une fois franchi ce rétrécissement qui relie les golfes de Corinthe et de Patras, je pars vers l’est, oh pas bien loin car 13 km me suffisent pour atteindre la petite ville de Naupacte (Ναύπακτος, que tu verras aussi orthographié Nafpaktos), une petite ville animée dotée d’un petit port à croquer, celui-ci entouré de remparts vénitiens. On dirait presque La Rochelle en miniature! Des jeunes du coin s’amusent à plonger, ça bronze et ça flemmarde sur les plages voisines, et sur les fortifs un drapeau grec tient compagnie à la statue d’un porteur de flamme olympique. C’est vraiment un joli coin, néanmoins souvent occulté par les visiteurs, pressés soit d’aller visiter Delphes vers l’est, soit de rejoindre le Péloponnèse vers l’ouest en passant le pont.







En plus de posséder un des ports les plus mignons qui soient, Naupacte a d’autres atouts, comme son petit centre-ville paisible et les ruines de sa forteresse qui domine la cité et le golfe de Corinthe. Oui, ça grimpe un peu, mais grimper au hasard des venelles pavées et fleuries, où les citronniers et les orangers alternent avec les pins et les cyprès, ça amoindrit la peine. Oui, j’ai bien fait de m’arrêter à Naupacte!





C’est à Naupacte que s’est déroulé, en 1571, l’une des plus grandes batailles navales de l’histoire: la bataille de Lépante, qui opposa les chrétiens de la Sainte-Ligue et les ottomans. Ce combat naval géant vit la défaite des turcs, qui y perdirent des dizaines de navires. Cervantès, le créateur de Don Quichotte, y perdit une main au combat. C’est pour celà qu’une statue du génial auteur a été érigée près du port.

Je quitte Naupacte pour longer le superbe golfe de Corinthe sur environ 90 km (j’en aurai fait de la route aujourd’hui!), en passant par de petites stations balnéaires sympas et un paysage qui ne reste jamais trop longtemps monotone: des falaises, des maisons perdues au milieu des oliviers et des cyprès… Parfois la route grimpe, je note qu’il y a pas mal de camions, pas facile pour eux dans certaines côtes… Et me voilà en Grèce-centrale, je passe du nome d’Etolie-Acarnanie au nome de Phocide, en me rapprochant du célèbre site archéologique de Delphes. Mais on s’y intéressera demain matin, à la première heure d’ouverture. Pour l’instant, je pose mon sac dans le petit village de Crissa (Χρισσό), à l’écart des foules et d’une tranquillité absolue.


J’ai choisi une petite chambre d’hôtes, où je connaîtrai la magie du sens de l’accueil grec, avec des hôtes fabuleux, je me verrai même offrir une petite corbeille de fruits tout juste cueillis de leur verger en guise de bienvenue. Et la vue sur cette mer d’oliviers et le golfe de Corinthe est sublime! Crissa est un joli petit patelin, ce qui ne gâche rien, avec ses petites rues en pente, ses deux églises et sa place ombragée qui pourrait nous faire croire qu’on est en Provence. J’ai même vu un groupe de chèvres sans chèvrier, allant je ne sais où; sont-elles en semi-liberté ou connaissent-elles le chemin du bercail par coeur? On y trouve quelques petites tavernes traditionnelles, où le touriste est plutôt une espèce rare; en tout cas l’agneau rôti de Grèce n’a rien à envier avec celui des pays des Balkans! Cet arrêt à Crissa était une belle occasion de se raprocher d’un mode de vie locale plus sincère.








J’ouvre juste une petite parenthèse: depuis Athènes, on en a fait du chemin, on en a vu des choses… J’espère que tes réserves d’énergie sont encore à niveau acceptable, parce que cette journée marque pile poil la moitié du périple! La Grèce n’en a pas fini de me dévoiler tous ses trésors!
Après un monstrueux petit-déj’, un trajet dérisoire de 5 km va me conduire au site archéologique le plus visité du pays après l’Acropole, dont le nom fera dresser les poils des fanas d’histoire, de colonnes et de vieilles pierres: je t’emmène découvrir Delphes (Δελφοί, parfois orthographié Delfi).
Le village de Delphes, on peut faire l’impasse, c’est le même style qu’Olympie, avec un défilé de boutiques, bars et restos. Pour manger un bout à la rigueur, mais pour le reste… J’ai bien fait de dormir à Crissa!
Alors Delphes, c’est avant tout un sanctuaire dédié au dieu Apollon. Pour l’anecdote, le nom de Delphes (Delfi) vient du dauphin: Apollon aurait pris la forme de l’animal pour attirer les marins crétois chargés d’instaurer son culte sur le site. Et surtout, c’était aussi… un cabinet de voyance. Euh, pardon? Si je te dis “pythie”, “oracle”, tu as sûrement des souvenirs de cours d’histoire qui te reviennent? Exactement, c’est à Delphes que cette étrange prêtresse nommée Pythie délivrait les prophéties (autrement nommées oracles), que le dieu Apollon himself lui transmettait, aux pélerins venus la consulter. Cet état de transe ne lui venait pas d’un rail de coke, tu t’en doutes, mais de vapeurs toxiques et hallucinogènes venant d’une crevasse sur laquelle était posé son siège. À noter qu’il y a eu plusieurs pythies au cours du temps, et même des pythies “remplacantes”. Pour davantage de détails, tu as un lien un peu plus haut.






Le site, entouré de montagnes, est d’une grande beauté. Pas trop de monde encore, mais ça vient juste d’ouvrir, et je sens que ça va pas durer! Et crois-moi, il vaut mieux le visiter en matinée, car le denivelé n’est pas mal (pas comme à Mystras, mais peu s’en faut), ça grimpe, et le mercure suit la même tendance!
La visite longe la Voie Sacrée, qui était jalonée de temples et de “trésors”, des petits édifices bâtis pour commémorer une victoire ou abriter les diverses offrandes faites à Apollon. Par exemple, le Trésor des Athéniens est très bien conservé. Du Temple d’Apollon, il reste quelques colonnes mais le lieu, chargé d’histoire, reste imposant. Quant à cette curieuse colonne torsadée, qui détonne un peu dans le décor, elle symbolise une offrande des athéniens suite à une victoire sur les Perses.





En contrebas, les premiers groupes en autocar arrivent, avec leur guide qui brandit bien haut un drapeau ou un parapluie. Ce tourisme moutonnier, je n’arriverai jamais à m’y habituer… Après le Temple d’Apollon, la montée continue et mène à un théâtre antique super bien conservé et très homogène dans ses formes, presque un mini-Epidaure. Courage, un dernier effort pour se propulser au niveau du stade qui lui aussi a fière allure, bordé de pins et les montagnes en guise de toile de fond. Dommage que l’accès en soit interdit, pour des raisons de sécurité. Après, reste plus qu’à redescendre tout çà et de slalomer entre les groupes de touristes qui boivent les paroles monocordes de leur guide; j’ai même aperçu une dame clopinant péniblement avec des béquilles… Atteindra-t-elle seulement le stade? je comprends pas les gens, des fois.



Un excellent complément à cette visite est bien sûr le musée archéologique, dont les stars incontestées sont le majestueux Sphynx de Naxos, et celui dont tout le monde connaît l’image mais pas forcément le nom: l’Aurige de Delphes, avec sa stature altière et son regard si troublant. En conclusion, la visite du site de Delphes restera un des temps forts de ce voyage!



Missolonghi et Parga.
J’aurai deux grosses étapes de roulage aujourd’hui (c’est mon choix), j’entame la première au départ de Delphes pour revenir vers Naupacte. En voyant au loin le pont Rion-Antirion je me dis “ah, j’y suis presque!”; seulement cet ouvrage est tellement immense qu’en réalité je me trouve encore à 20 km de Naupacte! Je fais le yo-yo en revenant en Grèce-occidentale. Après Naupacte, j’ai encore 40 km à parcourir vers l’ouest pour ensuite obliquer vers une nouvelle “surprise” que me réserve cette Grèce tant inattendue!
C’est vers Missolonghi (Μεσολόγγι) que je me dirige. Pourtant, la ville, que je traverse, n’est pas terrible, il y a beaucoup d’immeubles modernes et des rues ordinaires. Mais ce qui s’étend au-delà de la ville va se révéler plus intéressant. J’emprunte en effet une route rectiligne qui traverse une vaste lagune (je pense qu’elle fait un peu office de digue), pour bientôt longer de vastes parcelles de salines. De l’autre côté de la route, des petits canaux sont bordés par des cabanes de pêcheurs, qui ressemblent un peu à un mix de châlet de Gruissan et de cabane de la baie d’Arcachon. Je ne m’attendais pas trop à contempler ce type de paysage en Grèce; et les montagnes en arrière-plan ajoutent une autre note pittoresque au décor.





Oh, c’est marrant çà: une petite chapelle de bord de route qui se trouve juste à quelques mètres d’une petite cabine téléphonique; çà c’est du contraste! En face de la jolie petite église blanche, un resto sympa, avec des chaises colorées et une terrasse en pilotis, sert de fabuleux plats et assiettes de produits de la mer. Je m’offre une copieuse assiette composée (calamars, sardines, anchois, et j’en oublie), en me bagarrant un peu avec la nappe en papier qui essaie de se barrer à cause du vent. Ça me saoûle, je renforce son calage avec mon verre à bière et la salière, et maintenant tu te tiens tranquille, OK? Ah, et pour info le resto s’appelle Tourlida, qui est aussi le nom de cette zone de salines.

Allons un peu voir ces salines de plus près. Elles sont encore exploitées, mais la vieille machine abandonnée, bouffée par la rouille, tranche avec l’ensemble. J’aime bien les tonalités de couleurs des salines, allant du blanc (on dirait parfois du givre) au rose éclatant. Il y a aussi un petit musée du sel et une plage format de poche. Quel pays, quand-même! À chaque arrêt de ce genre, j’ai l’impression d’ouvrir la capsule jaune d’un Kinder surprise…






Il est temps d’entamer ma deuxième grosse étape de roulage, au moins après je serai tranquille. C’est surtout pour me rapprocher d’un endroit qui sera stratégique pour la suite du voyage. Mais une chose à la fois, n’est-ce pas? Long trajet, mais pour une fois ce sera majoritairement sur autoroute. Les autoroutes grecques ne sont pas mal, elles sont à péage, avec encore beaucoup de guérites tenues par des préposés qui prennent la petite monnaie. Par contre, les stations-service sont parfois un peu éloignées les unes des autres.
En me dirigeant vers le nord, voilà que je change une nouvelle fois de région: j’entre dans l’Epire, qui possède une frontière avec l’Albanie. Je passe près de Preveza, la mer s’étend à ma gauche, et j’aperçois au loin ce qui doit être l’île de Paxos, une des îles ioniennes. Encore 45 minutes de route et j’atteins enfin (c’est le cas de le dire!) la petite ville côtière où je pose mon sac cette nuit: je suis arrivé à Parga (Πάργα).

La partie haute de Parga n’est pas terrible, avec ses maisons et immeubles surtout destinés aux hébergements. C’est dans ce secteur que je passerai la nuit. Mais c’est pour autre chose qu’on vient ici: pour admirer un petit port aux maisons colorées abrité dans une petite anse, surmonté d’un promontoire où se dresse un vieille forteresse. Mais une constatation saute aux yeux dès mes premiers pas dans les ruelles de la vieille ville: l’endroit est super joli et ça se sait. Wow, c’est touristique à mort, ça me refroidit un peu. Enfin bon, je pensais pas à ce point-là!
Que soit, je vais d’abord prendre de la hauteur et monter jusqu’à la forteresse (encore un coup des vénitiens!), pour avoir une première vue d’ensemble. La montée est facile, et l’endroit plutôt calme, le gros de l’agitation se passant en bas. J’avoue que le panorama sur le port, faisant face à une petite île abritant une chapelle, n’est pas désagréable. C’est déjà çà! Dommage que ce ne soit pas plus sécurisé: regarde l’escalier qui grimpe sur les parties hautes, il n’est pas très rassurant, j’ose à peine imaginer des gosses le dévaler en courant…




